Maison médicale La passerelle – Propageons la solidarité et semons des possibles

Avant du vous raconter l’histoire des bacs des incroyables comestibles de la M.M. La passerelle, on avait envie de partager avec vous l’histoire des « incroyables comestibles » tout court…savoir d’où on vient nous permet de savoir où on va…

Tout commence en 2008, à Todmorden une ville industrielle anglaise qui traverse une crise économique. A ce moment, les habitant.e.s ont l’idée de transformer un jardin floral en jardin potager et d’y écrire « nourriture à partager ». Mais pourquoi ? Les buts étaient multiples : cultiver ensemble pour se nourrir, permettre à tout le monde de se nourrir gratuitement, recréer des liens sociaux autour des bacs. Ces objectifs ont permis aux personnes de se reconnecter avec une alimentation saine et durable, mais aussi de changer la relation avec et dans l’espace dans lequel ils et elles vivent.

Mais comment sont-ils arrivés à Liège ? En avril 2013, l’association Le Beau-Mur lance une soirée d’information pour semer des grains pour que cette nouvelle aventure voie le jour en cité ardente. Des bacs fleurissent petit à petit dans les différents quartiers de la ville.

En 2017, la Ville de Liège devient partenaire du projet, pour délivrer « le permis de végétaliser » qui est donné aux personnes ou aux asbl qui en font la demande.

Mais revenons à nos bacs…

L’équipe MM Passerelle, avait déjà depuis quelques années l’idée de faire un potager devant ses locaux. Puis, cette idée a pris forme. Et vous savez quand ? En pleine crise sanitaire ! Car cette crise a exacerbé des évidences qui étaient déjà présentes : la solitude des personnes vivant en milieu urbain, le manque d’espace verts à partager, l’accès à la nourriture qui en temps de crise devient toujours plus difficile…et, pris dans un élan de solidarité, nous nous sommes lancé.e.s.

Mais nous ne pouvions pas nous embarquer dans ce projet tout seuls ! Pour nous c’était primordial de le faire avec nos patient.e.s. C’est ainsi que l’asbl L’Impatient, association des patients de la MM La Passerelle, est devenue notre partenaire…et au fur et à mesure et de bouche à oreilles un groupe de patient.e.s s’est constitué pour qu’on puisse concrètement avancer dans notre projet.

Nous avons contacté le Beau-mur pour qu’ils nous expliquent comment démarrer. Nous avons fait la demande du permis de végétaliser à la Ville qui a été délivré en automne 2020. De plus en plus, le projet se concrétisait et de plus en plus l’enthousiasme montait. Nous avons contacté un collectif liégeois Lost Niños pour nous aider à fabriquer les bacs dans leur hangar…On s’en rappellera toujours : on était là à désosser les palettes, visser, couper avec -8C°…

Les bacs ont été installés en mars 2021, le lendemain des sacs de terre arrivaient. Le boulot fut énorme pour mettre la terre dans les bacs. Le mois d’avril, nous avons installé les arcades en osier vivant avec Végétalise pour donner une touche de vert supplémentaire à notre projet et au quartier. Ce même jour des arbustes fruitiers et des aromates ont été plantés. Puis nous avons pris le temps de faire des semis, les voir pousser et en prendre soin.

Nous sommes conscient.e.s que ces bacs potagers ne vont pas nourrir tout le quartier d’Outremeuse, mais ils nous permettent de semer des possibles.

Une des plus belles réussites de ce projet ce sont les échanges avec les patients et les passants. Des liens naissent et commencent à se tisser.

Une chose est sûre, nous continuerons à semer des graines solidaires, participatives et conviviales.

Donatella Fettucci, coordinatrice et animatrice en santé communautaire à la MM La passerelle

Témoignage d’un patient qui est dans le projet

Quand on m’a demandé de participer, dans un premier temps j’ai refusé : je n’aime pas jardiner, toute ma jeunesse j’ai dû arracher des mauvaises herbes dans le jardin parental, planter dans la gadoue des centaines de poireaux, très peu pour moi …

Et puis je déménage et je bénéficie d’un accès à un petit jardin, j’ai une cour …

Construire des bacs potagers, ça commence à m’intéresser car j’aimerais en construire chez moi aussi un jour.

Je participe alors à la construction avec Lost Niños, on décloue des dizaines de palettes en bois pour pouvoir construire les bacs. Et là, je me rends compte rapidement que je m’inscris dans ce projet, pas simplement pour semer et récolter mais pour tout le côté ouverture, contacts, et relations humaines dans ce contexte covid.

Par exemple, Lost Niños, c’est un collectif très dynamique qui produit des œuvres artistiques à partir de bois recyclés (c’est l’image que j’en ai) mais dans le même lieu il y a aussi un atelier de recyclage vélos et de réparation de ceux-ci. Branché sur le vélo depuis trois ans, ayant peu de moyens, cette association est une vraie découverte pour moi. Je dégote une belle selle noire et rouge de réemploi et je la fixe moi-même sur mon vélo, un vrai bonheur pas cher.

Et là, je commence à mordre vraiment dans le projet grâce à cette dynamique enclenchée, je participe à l’installation des bacs sur le trottoir de la maison médicale et tous ensemble nous les remplissons avec de la terre amenée dans d’énormes « bags ». Là je me rends compte que tout le personnel de la maison médicale met la main à la pâte et c’est une vraie joie pour moi car je sens une forme de relations différentes, plus égalitaires entre les professionnels et les patients.

Ensuite nous commençons à semer, repiquer, planter et à ouvrir le projet au public lors du festival « Nourrir Liège » place cathédrale. Cette ouverture continue avec une collaboration avec la maison médicale St-Léonard : nous échangeons plantes et expériences.

Fin mai, je participe à une promenade inter maisons médicales où nous visitons « le champ des possibles » à Jupille, lieu très inspirant et cultivé avec respect où les clients viennent se servir eux-mêmes de légumes et fruits de saisons.

Je suis maintenant pleinement partie prenante dans ce projet coconstruit.

Joël Bouillon, patient